Michel CABIEU Xperience

1762. Cela fait déjà six ans que la France est en guerre. Les côtes normandes et la Manche n’échappent pas à la surveillance et aux attaques de la marine anglaise. Autour de Ouistreham, petit bourg de pêcheurs et de paysans assez pauvres, on ne trouve guère que trois minuscules structures défensives.

Parmi ces hommes censés garder nos côtes, un sergent, fils d’instituteur, se distingue particulièrement. Il a trente-deux ans et s’appelle Michel Cabieu. Rémunéré six livres par an pour cette tâche.

Dans la nuit du 12 au 13 juillet 1762, Cabieu est brusquement réveillé par des coups de canon. Une escadre anglaise a mouillé non loin de l’embouchure de l’Orne et des goddons, des « habits rouges », ont profité de la brume pour débarquer.

Lorsque Cabieu, empoignant son fusil, sort de chez lui, ils ont déjà pris la batterie de Sallenelles, tué sept de ses desservants et fait seize prisonniers.

 

En chemin, Cabieu rencontre quelques fuyards et s’efforce, en vain, de les retenir. Mais, ceux-ci refusent de le suivre. Cabieu s’enfonce alors dans les marais de Colleville et tombe sur un sacristain, Jean Lelièvre, ivre mort et qui, refusant de l’accompagner lui aussi, lui abandonne son tambour.

Constatant l’avance inexorable du détachement anglais, Cabieu se retourne contre l’ennemi et se met à battre la charge. Inquiets, les Anglais stoppent net. Autour d’eux, se déchaîne une troupe de guerriers.

 

Dans l’obscurité, ils sont dix, ils sont cent. Des coups de feu éclairent la nuit, venant de partout.

Des ordres sont aboyés, puis d’autres coups de feu suivis de roulements de tambour. En fait, c’est Cabieu qui, se déplaçant dans toutes les directions aussi vite que possible, joue tous les rôles à la fois.

Pris de panique, les Anglais finissent par rebrousser et réembarquent. Cabieu était-il vraiment seul ou étaient-ils trois ou quatre ? Peu importe, au fond. Sa stratégie a été payante. Le lendemain, il négociera la libération des seize prisonniers.

L’exploit sera vite connu.  Cabieu obtient du roi Louis XV une pension de cent livres. Puis, l’oubli retombe et la misère guette. Par chance, émus par son sort, les députés du Calvados à la Constituante et à la Convention, Cussy et Oudot, le rappellent au bon souvenir des députés. En 1794, une rente annuelle de six cents livres lui est accordée.

 

 

 

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